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J’aime le papier – Quelques mots sur l’histoire de mes agendas

Back to blogging 3/10

J’aime le papier, son grain, sa texture, sa teinte, sa main, son parfum. La manière dont il réagit à la plume, au crayon, à la bille du stylo. Merveilleuse matière porteuse de signes et de messages, durable, facile à conserver, immédiatement disponible sans alimentation électrique, utile même pour allumer le feu. Les plus beaux ? Le vergé, le filigrané et celui sur lequel on imprime les estampes et autres sérigraphies. Le plaisir maximal est atteint quand l’accord est parfait entre la plume qui glisse, laissant sa trace luisante, et la page satinée qui la reçoit en surface, là où l’encre sèche au lieu de suive les fibres dans la profondeur du papier. Pour la danse de la plume, les carnets Moleskine sont bons;  les cahiers Clairefontaine flirtent avec l’excellence, mais ils n’ont pas cette belle teinte crème.

J’aime aussi tout ce qui sert à écrire et à dessiner. Quoi de plus beau qu’une grande boîte de crayons de couleur ? Tout ce qui est capable de laisser une marque sur du papier me fascine, pinceaux, calames, stylos, mines de plomb du 5 H au 5 B, avec une préférence pour le 2B, contés, feutres et fusains. Quand je découvre une ville nouvelle, je visite ses papeteries. C’est là que j’achète mes souvenirs.

Il faudrait encore évoquer la typographie. Il y a toujours une émotion à sentir au bout du doigt qu’un papier a vraiment été imprimé : il garde un gaufrage, la marque des caractères de plomb qui ont posé l’encre dans le papier en s’y gravant. Les impressions d’aujourd’hui sont légères et superficielles en comparaison – mais pas moins belles.

Et pourtant, paradoxe, je rédige ces lignes à l’ordinateur, sans même passer par un brouillon manuscrit. Car j’aime aussi la technique, les machines, les bidules électroniques. Mes outils d’organisation sont passés du papier à l’écran. Pas d’un coup ni en une fois : il a fallu que les outils techniques deviennent suffisamment convaincants pour que j’abandonne tout le bel univers sensoriel du papier.

Puisque j’ai promis de parler de mes différentes tentatives d’organiser ma vie professionnelle (au moins celle-là), disons que j’ai fonctionné pendant de nombreuses années avec un agenda à anneaux, une feuille par jour, et des pages pour les notes, les comptes, les adresses etc. J’ai utilisé les modèles Succes Standard de chez Biella (ils sont toujours produits). Ils m’ont rendu les services que j’en attendais pendant au moins 15 ans : gérer mes classes, mes travaux, mes leçons, inscrire les notes, etc. À partir du moment où j’ai eu un ordinateur et une imprimante, j’ai produit mes propres modèles, imprimé les adresses, amélioré l’ordinaire de l’offre standard. J’ai dû acheter une perforeuse capable de faire 6 trous, fort chère. Mais les trous étaient d’un diamètre plus grand que ceux des pages vendues par l’éditeur de l’agenda, ça faisait bricolé, et ça me gênait.

Puis, vers 1990, j’ai craqué pour les organiseurs grand format, reliés cuir. Un kilo au bas mot. Les pages étaient au format A5 et avaient aussi six perforations. J’ai donc pu continuer de me servir de ma perforeuse. Il y avait des divisions plus nombreuses que dans la version Succes. Mais j’ai joué de malchance : l’éditeur que j’avais choisi a cessé de produire ses agendas, et j’ai dû me rabattre sur ceux d’un concurrent, plus beaux, mais incompatibles avec le matériel déjà acheté, parce que les perforations n’étaient pas espacées de la même manière.

Peu après – c’était fin 1997 – j’ai acheté un Newton et j’ai lâché tout ce papier.

J’en parlerai demain.