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Cassez vos lunettes

La technologie, j’aime. Les nouveautés, j’aime. Mais certaines sont plus flippantes que d’autres. Concernant la ou le Google Glass, la fascination est grande, la crainte plus grande encore.

Dans la branche droite de cette paire de lunettes se loge une caméra vidéo, un micro et un petit projecteur vidéo destiné au porteur ou à la porteuse de ces lunettes. Si vous voulez savoir ce qu’on ressent en les portant et ce que c’est capable de faire, il suffit de cliquer sur un de ces liens.

Ce qui me frappe, c’est le caractère résolument intrusif de ces lunettes. Si leur usage se généralise, ce qui reste encore de la vie privée va probablement disparaître et tout le monde sera invité à sourire de manière un peu crispée, puisqu’à tout moment on pourra être filmé, photographié et enregistré. En regard (si j’ose dire), les caméras de surveillance des espaces publics ne seront plus qu’une aimable plaisanterie.

Plus grave encore, tout ce qui passera par les Google Glasses sera enregistré dans les serveurs de Google. Pas grave, diront certains : nous dépendons déjà tellement de l’informatique dans le nuage que ce supplément n’est que la continuation de ce que nous connaissons, et on ne voit plus tellement comment faire autrement. Notre courrier y est stocké, nos photos également, à quoi il faut ajouter des documents partagés et nos sauvegardes sur DropBox ou iCloud. C’est facile, agréable, ça se fait sans peine et ça synchronise nos calendriers, courriels et autres agendas entre les appareils dont nous nous servons.

Bientôt, Google pourra donc non seulement connaître notre courrier, les pages web que nous visitons, notre emploi du temps, nos documents dans le nuage, nos déplacements et tout ce que d’autres ont dit ou écrit de nous, mais aussi voir comme par nos yeux, écouter comme par nos oreilles ce que nous faisons, les gens que nous rencontrons, le milieu dans lequel nous vivons, les propos que nous échangeons. Et stocker tout cela pendant des années sur ses serveurs.

D0n’t be evil, ne soyez pas malveillants, recommande la devise de Google. Google est cool, Google ne veut pas faire de mal, Google veut rendre le monde meilleur. On ne demande qu’à le croire. Mais Google peut changer de devise, Google peut décider subitement d’utiliser autrement l’omniscience dont il dispose (comme il a décidé de supprimer le service Google Reader). Et si un jour devait surgir un gouvernement totalitaire, nul doute qu’il ne contraindrait Google à fournir ses données pour déterminer qui est bon et qui est mauvais citoyen. Cool, non ?