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Écrire

Réamorçage

Ce n’est pas qu’il ne se passe rien dans le monde, ni qu’il n’y ait rien à dire sur le coronavirus et le confinement qu’on nous demande d’observer. La planète s’est arrêtée, le pétrole coûte moins que rien, les services de santé sont au front, et les gens qui guérissent du Covid-19 témoignent qu’ils ont passé par des moments très difficiles. Étant moi-même une “personne à risque”, je reste prudent. Je vais quand même courir, tôt le matin, à la campagne, dans des lieux où je ne croise, exceptionnellement, que d’aussi vieux que moi. Je serais malvenu de me plaindre, j’ai de l’espace en suffisance chez moi. Je ne vais pas faire exprès d’aller m’exposer dans des endroits où je risquerais ensuite d’infecter d’autres que moi.

Mon petit souci est différent. Le confinement fait tourner mon moteur d’écrivain au ralenti. Le roman auquel je travaille a de la peine à avancer. Je ne peux ni visiter les endroits que j’ai choisis comme cadres de l’action, ni rencontrer des gens pour me renseigner sur leur travail, les observer quand ils y sont, respirer les ambiances, prendre des notes, capter des images. J’ignore quand cela redeviendra possible. Sans ces aliments extérieurs, ma progression est à la peine. À cela s’ajoutent des engagements et des responsabilités qui, tout à coup, réclament toute mon attention et toute mon énergie. Les vidéoconférences sont précieuses pour garder le contact avec ses proches éloignés (curieuse expression), mais aussi des outils qui vous obligent à danser sur des musiques que vous n’auriez pas choisies. Voilà comment je perds la paix et la sérénité, la distance et la disponibilité dont j’ai besoin pour écrire. Je voudrais faire taire les soucis du dehors, mais ils ne m’entendent pas. Je ne parviens pas à m’anesthésier pour les oublier, et même si j’en étais capable, je craindrais que cette anesthésie ne s’étende aux choses dont j’ai besoin pour écrire.

Soucis de luxe, j’en conviens, mais comme une partie du sens de mon existence vient du travail avec l’écriture, je décide de reprendre ce blog, de me contraindre à écrire quelque chose et à le publier ici, quitte à parler de tout et de n’importe quoi pour réamorcer la pompe. La suite viendra, je l’espère, plus facilement.

Photo by Jen Theodore on Unsplash